Il est environ midi dans la région de Rafraf sur la côte tunisienne. Le soleil tape très fort, ses rayons se faufilent par la fenêtre pour caresser la peau brûlante de Ridha. Il ouvre les yeux doucement, s’étire de tout le corps sur le lit « demi-place » installé par terre. Il attrape son paquet de cigarettes de la marque Cristal (une marque ancienne et toxique de clopes aimée par les vieux, les pauvres et les rebelles). Il tire une première taffe et avance vers la fenêtre en maudissant la canicule qui fait jaillir des gouttelettes de sueur de tous les pores de son visage. Il fume tranquillement sa cigarette en matant les passants de sa rue : groupe de femmes en tenues de plage, hommes en sueur énervés par la chaleur, voitures qui klaxonnent et insultes multiples mais similaires qui résonnent partout. Ridha abandonne la fenêtre, se lave le visage et ses dents d’un geste rapide voire négligé, et se change sans prendre sa douche.
Il descend les escaliers vers le café le plus proche, tire la première chaise et lance :
– Mââlem (maître serveur), un café corsé s’il te plaît.
– Tout de suite Ridha.
En attendant son café, il pense déjà à sa journée : rejoindre wled el houma (les mecs du quartier), se poser sur la plage et mater les gonzesses en rêvant de « se faire » l’une d’elles.
Le café arrive, il l’avale d’un coup, laisse 850 millimes sur la table et disparaît.

Arrivé à la corniche, il aperçoit ses potes et crie :
– Lawled (les mecs), c’est quoi l’ambiance aujourd’hui ?
– Rien Ridha, répond Lamjad. Il y a une nouvelle famille aujourd’hui : 2 filles machallah et même une gawriya (étrangère).
Il pointe du doigt la famille. Ridha découvre à l’ombre d’un parasol Coca-Cola (traditionnel parasol populaire tunisien) une vieille femme voilée avec autour d’elle deux jolies demoiselles brunes et une blonde à la peau laiteuse.
– Qu’est-ce qu’on attend ?, lance-t-il.
Le groupe des cinq mecs se dirige avec un pas déterminé vers le parasol. Il s’arrête à une dizaine de mètres, et les garçons s’installent sur le sable tout en jetant des regards enflammés et insistants sur les filles. Elles regardent alors dans la direction du groupe et se retournent directement en cachant indiscrètement leurs affaires sous une grande serviette de plage. Ridha se lève alors, enlève son tee-shirt et se dirige vers l’eau. Il rentre directement d’un pas décidé et se jette avec un saut acrobatique dans les vagues. Sortant la tête de l’eau, il entend ses amis ricaner de loin : « Ah mais il fait l’intéressant ! », « Tarzan dans l’eau », « Il se prend pour Oussama Mallouli (champion olynmpique tunisien de natation) » … Il voit les filles le scruter discrètement et s’échanger quelques paroles. La vieille femme continue à lui jeter des regards méprisants. Il fait quelques mètres à la nage et se décide à sortir de l’eau en criant : « Eh les mauviettes, vous avez peur de l’eau ou quoi? ».
Les garçons continuent à ricaner. Alors, il s’allonge sur le dos, allume une clope et regarde le groupe de filles. Les deux brunes à la peau mate sont jolies, fines de taille, avec des rondeurs féminines installées là où il faut. Leurs cheveux crépus sont relevés en deux chignons avec quelques mèches rebelles qui dépassent pour donner un air sauvage et négligé à la coiffure. Elles portent toutes les deux un maillot une pièce sans aucun cache-maillot ni short.
– Ça se voit qu’elles ne sont pas de la région, affirma Lamjad.

Mais Ridha s’attarde plus sur la blonde étrangère. Elle porte des cheveux soyeux qui retombent en cascade sur ses épaules. Sa frange carrée dissimule son front et lui donne un air jeune et candide. Elle porte un deux pièces rouge provocateur. Cependant, elle ne correspond pas aux critères de beauté tunisienne : grande de taille, des formes très menues et des os apparents.
– Ah laisse tomber mon pote, c’est une planche à pain, lui siffle Lamjard.
– Non, ne t’inquiète pas, ce n’est absolument pas mon style, j’adore les formes, Répond-il.
Néanmoins, il continue à la regarder. Ses détails l’intriguent : sa manière d’ouvrir la bouche à moitié pour parler, son sourire discret, les ronds dans le sable qu’elle dessine avec son doigt en contemplant la mer. Sentant que ses potes ont remarqué son intérêt pour la blonde, il se retourne vers eux et lance :
– Vous ne voulez pas aller vous baigner?
– Non la baignade à cette heure-ci est pour les étrangers, non pour wled el bhar (littéralement les enfants de la mer).
Ridha se lève alors et se rhabille, jette un dernier coup d’oeil sur la blonde et croise son regard avec surprise. Elle lui fait un demi-sourire et se retourne vers une des brunes pour lui parler.
– Sââlam lawled (au revoir les amis), salue-t-il ses amis.
Ainsi, il abandonne ses potes et se dirige vers la corniche. Il ne fait que 3 pas et entend crier derrière lui : « Attends » en français. Il se retourne et voit la jolie blonde debout en face de lui. Elle lui paraît encore plus grande. Elle s’approche de lui, mais il commence à rougir ne sachant pas quoi faire. Elle lui glisse un papier furtivement entre les doigts et dit doucement « appelle-moi ». Il ne croit pas ses yeux ! La gawriya aux cheveux d’orge vient l’aborder. Ne sachant quoi répondre, il sourit bêtement en montrant une rangée de dents jaunies par la clope et le manque d’hygiène. La fille retourne vers son parasol. Il jette un regard sur ses potes, personne n’a capté la scène. Soulagé, il retourne chez lui.
…
(To be continued)
c joli le style de taher faze3 continue
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Merci Dorra pour ton commentaire 🙂
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